À propos

Le 25 août 1765, deux savants genevois, les frères Jean-André et Guillaume-Antoine Deluc, tentent de gravir le Mont Buet (3096 m), une montagne des États de Savoie d’alors. Le but de leur expédition est de réaliser plusieurs expériences au sommet : mesurer la température de l'eau bouillante et déterminer la hauteur du mont en mesurant la pression atmosphérique. Alors qu'ils s'efforcent d'atteindre le sommet, leur thermomètre se brise, obligeant les deux frères à rentrer à Genève. Après une deuxième tentative infructueuse, les Deluc atteignent finalement le point culminant du Mont Buet le 20 septembre 1770. Le récit pittoresque de leur ascension et de leurs expériences suscite l'intérêt d'autres personnalités. En 1775, une nouvelle voie d'accès est découverte par Marc-Théodore Bourrit, artiste et écrivain genevois qui rend célèbres dans toute l'Europe les montagnes et les glaciers de la région. Les savants genevois Horace Bénédict de Saussure et Marc-Auguste Pictet suivent les traces de Bourrit jusqu'au sommet du Mont Buet où ils répètent les expériences de Deluc et réalisent leurs propres observations. Ces expéditions du XVIIIe siècle ont contribué à transformer la montagne en un laboratoire de la nature. Le sommet devient non seulement un site scientifique privilégié, mais aussi un point d'intersection entre différents mondes sociaux, ceux du praticien Saussure, du citoyen Deluc, du « natif » Bourrit, et des chasseurs de chamois et de cristaux locaux qui leur ont servi de guides.

En septembre 2020, puis en août 2021, deux cents cinquante ans après la première ascension, un groupe d'historiens du Laboratoire d'histoire des sciences et des techniques de l'EPFL (Jérôme Baudry, Simon Dumas Primbault, Ion Mihailescu), de chercheurs (Nicolas Chachereau, Marianna Fenzi, Nicolas Nova), d’un conservateur de musée (Stéphane Fischer) et d'artistes (Olga Cafiero, Pascale Favre et Joell Nicolas) a suivi plusieurs chemins jusqu'au sommet du Mont Buet pour reconstituer les expéditions historiques des savants genevois. Ils ont emporté avec eux une réplique du baromètre conçu par Deluc et amélioré par Pictet, qui a été réalisée par le Musée d'histoire des sciences de Genève avec l'aide d'artisans locaux. Cette ascension a été documentée par les artistes qui ont cherché à saisir, cachée derrière le sommet désigné par un point sur une carte, la montagne telle que générée par les corps qui la gravissent.

Les savants genevois n’ont pas seulement multiplié les cheminements, ils ont aussi tissé les perspectives – récits ou rapports, dessins et schémas, mesures et panoramas –, jusqu’à inventer de nouveaux langages symboliques, verbaux et graphiques. Si le milieu imposait alors à ses visiteurs d’entrelacer traces et sentiers, il ne pouvait, réciproquement, être porté à la conscience collective de la plaine que par une pluralité de médias. L’expédition contemporaine a prolongé cette aventure interdisciplinaire. Comme par le passé, de nouveaux langages ont été développés, de nouveaux médias ont été sollicités, photographie, son, instruments de mesure numériques, dessin, afin de peindre le Mont Buet comme un milieu vivant, rebelle à une complète domestication, un milieu qui ne cessera d’être vécu dans la diversité d’expériences individuelles tout à la fois sensibles et scientifiques.

Pascale Favre

Pascale Favre est née en 1970 à Genève où elle vit et travaille. Elle a étudié l’architecture d’intérieur de 1990 à 1994 à l’École supérieure d’Arts appliqués de Genève, elle a ensuite poursuivi ses études à l’École des Beaux-arts de Genève de 1998 à 2002. Entre-temps, elle a collaboré comme architecte d’intérieur en Allemagne puis s’est consacrée à la musique baroque. Après avoir obtenu son diplôme aux Beaux-arts, ainsi que le prix du Fonds cantonal d’art contemporain, elle a travaillé comme assistante dans l’atelier de dessin et peinture des Beaux-arts de Genève avant de recevoir une bourse et une résidence pour Le Caire. Depuis son retour, elle enseigne au CFP ARTS dans les classes propédeutiques d’art et de design. En 2006, elle rejoint le comité des éditions art&fiction qu’elle a présidé de 2014 à 2016. Depuis 2006, outre son travail plastique, elle développe un travail scénique à travers la performance, la musique expérimentale et baroque et des lectures. En 2010, elle est lauréate de la bourse Alice Bailly. En 2014, elle publie un premier roman et poursuit également ses recherches sur les rapports entre texte et image. Elle reçoit de la Ville et du Canton de Genève la bourse à l’illustration en 2016.

Un espace pour la pensée

Ma pratique artistique s’articule autour du dessin, de l’installation et de l’écriture dont je me sers pour créer un lien ténu avec l’espace, qu’il soit représenté, décrit, mémorisé ou réapproprié. J’aborde la représentation du paysage comme relation au monde qui m'entoure en transposant la réalité d'une expérience par le dessin. Les montagnes sont un sujet que je privilégie car elles évoquent non seulement un lieu précis que j’ai observé et contemplé mais aussi une idée plus vaste de paysage. Pratiquement, les tracés à l'encre de Chine se mêlent à des formes colorées initialement déposées sur la surface du papier comme élément déclencheur. Le choix des couleurs, sorte d'indice minimal de notre monde polychrome est issu de recherches oscillant entre la réalité et les souvenirs. Les compositions colorées concentrent ainsi leurs qualités évocatrices et suggèrent des variations illimitées.

Le travail réalisé pour Le sommet qui cache la montagne se développe en trois parties distinctes. Une série de dessins évoquant des paysages traversés que j’ai dessiné à mon retour en atelier et qui sont axés sur les souvenirs de mes impressions (couleur et espace), un herbier constitué à partir de photographies des fleurs rencontrées tout au long de la marche et d’un ensemble de dessins et de textes - offrant une vision plus narrative de l’expédition -, composés de moments marquants de ces deux journées de randonnée autour du Mont Buet.

Joell Nicolas

Joell Nicolas est née à Vevey en 1989. Elle a étudié le piano avant d'orienter ses études en intégrant le département d’Histoire de l’Art et de Musicologie à l’Université de Genève. Toutefois, elle interrompt sa formation en 2012 pour se consacrer à son projet solo de musique électronique sous le nom de Verveine en tant que productrice, compositrice et chanteuse. Elle sort un premier album Peaks (DKLK Records) en 2013, puis un EP Antony (Creaked Records) en 2015. Elle suscite de l’intérêt de la part des acteurs culturels suisses (Paléo, Fri-Son, Les Docks, M4Music, BadBonn Kilbi, Lethargy, L’Usine, Bâtie) puis entre-ouvre les portes des scènes musicales pop en Europe (Transmusicales de Rennes, Printemps de Bourges, Plissken Festival en Grèce, Iceland Airwaves en Islande, Eurosonic Noorderslag au Pays-Bas, Strangelove en Belgique, Zemlika en Lettonie). Elle assure notamment les premières parties d’artistes tels que Connan Mockasin, Blond Red-Head, Dean Blunt, Lee Gamble ou encore Planningtorock.

Joell Nicolas a également collaboré à la création sonore de plusieurs spectacles tels que Peanuts, de Fausto Paradivino, mis en scène par Claire Nicolas, pour la Compagnie Überrunter à Lausanne en 2012. L’Urgence: at the end you will love me de Caroline Bernard, mis en scène par Karim Bel Kacem, au théâtre Saint-Gervais à Genève, en mai 2018. Mynameis, mis en scène par Michele de Luca pour le Centre d’Art Scénique à Bruxelles en mars 2019. Eromania (God is a dead smoker), performance radio de Caroline Bernard en collaboration avec Le Labo (Espace 2, RTS) au Centre pour la Photographie de Genève en juin 2019. Elle a sorti son premier album studio Hotdrama en septembre 2020 avec des collaborations telles que Christophe Calpini ou Arthur Hnatek. Elle poursuit actuellement sa tournée entre la Suisse romande, la Suisse alémanique et la France. En cette fin d’année 2021, elle compose une pièce sonore intitulée Les gens #1 en collaboration avec le Laboratoire d’histoire des sciences et des techniques de l’EPFL et le CDH-Culture dans le cadre de l’exposition Le sommet qui cache la montagne. Enregistrée en « field recording », cette pièce est une traduction libre des paysages sonores rencontrés lors de l’ascension du Mont-Buet.

Crédits

Ce site web fait partie d'un projet sur l'histoire des sciences en montagne mené par le Laboratoire d'histoire des sciences et des techniques de l'EPFL.

Il a été rendu possible par une bourse Agora du Fonds national suisse.

Des remerciements sont adressés à cinq institutions genevoises : le Musée d'histoire des sciences, le Muséum d'histoire naturelle, les Conservatoire et Jardin botaniques, la Bibliothèque de Genève, les Archives d'État de Genève.

 

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